Comment obtenir la prise en charge de votre maladie professionnelle en tant que fonctionnaire ?

Les fonctionnaires bénéficient d'un nouveau régime de prise en charge des maladies professionnelles depuis le 21 janvier 2017 calqué sur celui des salariés du secteur privé permettant de faciliter leurs reconnaissances. Le régime de prise en charge des maladies professionnelles des fonctionnaires est aujourd’hui triple selon la date à laquelle la maladie s’est déclarée.

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La définition de la maladie professionnelle

L’article L.822-20 du Code de la fonction publique prévoit que :

« Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions.

Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle

entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat.»

maladie professionnelle

Le régime de prise en charge des maladies professionnelles

En premier lieu, le régime de prise en charge des maladies professionnelles était d’origine jurisprudentielle. Le Conseil d’État exigeait la démonstration par l’agent d’un lien direct entre sa pathologie et ses conditions de travail.

CE, 22 décembre 2017, no 397938

Cette définition jurisprudentielle s’appuyait sur :

L’article 34 de la loi du 11 janvier 1984 pour la fonction publique de l’État

L’article 57 de la loi du 26 janvier 1984 pour à la fonction publique territoriale

L’article 41 de la loi du 9 janvier 1986 pour à la fonction publique hospitalière

En second lieu, l’ordonnance n°2017-53 du 19 janvier 2017 est venue codifier ce régime et instaurer un article 21 bis au sein de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983.

L’alinéa 4 de l’article 21 bis de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 prévoit que :

« Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. »

Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraine une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. »

Cet article renvoie donc directement au régime de prise en charge des maladies professionnelles prévues par le Code de la sécurité sociale.

Cependant, ce nouveau régime n’a vocation qu’à s’appliquer aux maladies professionnelles survenues après son entrée en vigueur.

Dans un premier temps, les juridictions ont reconnu l’entrée en vigueur immédiate de ce texte :

« D’une part, en l’absence de dispositions contraires, les dispositions précitées du II et du IV de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, qui sont suffisamment claires et précises, sont d’application immédiate. Elles ont donc vocation à régir les situations en cours, sous réserve des exigences attachées au principe de sécurité juridique, qui exclut qu’elles s’appliquent à des situations juridiquement constituées avant leur entrée en vigueur intervenue le 21 janvier 2017. Les droits des agents publics en matière d’accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l’accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. »

Voir. CAA NANCY, 3ème chambre, 18 décembre 2020, 19NC02313

CAA BORDEAUX, 3e ch., 23 mars 2022, n° 20BX00270

CAA DOUAI, 3e ch., 30 juill. 2020, n° 19DA01674, 20DA00467

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La jurisprudence a finalement évolué :

« L’application des dispositions de l’article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 résultant de l’ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l’absence d’un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l’octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu’elles s’appliquent à la fonction publique de l’État, qu’à la date d’entrée en vigueur, le 24 février 2019, du décret n° 2019-301 du 21 février 2019 »

CAA Nancy, 2e ch. - formation à 3, 9 juin 2022, n° 20NC02192

CE, 5ème - 6ème chambres réunies, 15 octobre 2021, 450102

Désormais, selon le corps de la fonction publique, la date d’entrée en vigueur de l’article 21 bis de la loi n°88-634 du 11 janvier 1984 est fixée au :

21 février 2019 pour la fonction publique de l’État en application du décret du décret n° 2019-301 du 21 février 2019.

 

10 avril 2019 pour la fonction publique territoriale en application du décret du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019.

13 mai 2020 pour la fonction publique Hospitalière en application du décret du décret n° 2020.566 du 13 mai 2020.

Enfin, en dernier lieu, l’article 21 bis a été abrogé à compter du 1er mars 2022 par l’ordonnance n°2021-1574 du 24 novembre 2021.

Ce principe est désormais repris sous l’article L.822-20 du Code de la fonction publique en vigueur au 1er mars 2022 qui prévoit que :

« Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions.

Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle

entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat.»

Cette modification résulte surtout d’une volonté de codifier l’ensemble des règles de droit relatives aux fonctionnaires au sein d’un code général de la fonction publique

En conséquence, selon la date de survenance de votre maladie professionnelle et le corps de la fonction publique, le régime de prise en charge sera différent.

Pour la fonction publique d’État :

Avant le 21 février 2019, application du régime basé sur l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984.

Entre le 21 février 2019 et le 1er mars 2022, application de l’article 21 bis de la loi n°88-634 du 11 janvier 1984.

À compter du 1er mars 2022, application de l’article L.822-18 du Code de la fonction publique

Pour la fonction publique hospitalière :

Avant le 13 mai 2020, application du régime basé sur l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986.

Entre le 13 mai 2020 et le 1er mars 2022, application de l’article 21 bis de la loi n°88-634 du 11 janvier 1984.

À compter du 1er mars 2022, application de l’article L.822-18 du Code de la fonction publique

Pour la fonction publique territoriale :

Avant le 10 avril 2019, application du basé sur l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984.

Entre le 10 avril 2019 et le 1er mars 2022, application de l’article 21 bis de la loi n°88-634 du 11 janvier 1984.

À compter du 1er mars 2022, application de l’article L.822-18 du Code de la fonction publique

Le régime de prise en charge des maladies professionnelles se relève donc complexe de par la multiplicité de régime en vigueur et de par les différences de base légale selon les corps de la fonction publique.

Les conditions de prise en charge d’une maladie professionnelle

Ce texte prévoit 3 régimes de prise en charge d’une maladie professionnelle.

En premier lieu, ce texte prévoit la prise en charge des maladies professionnelles désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale.

Schématiquement, votre pathologie devra remplir les conditions prévues par ces tableaux.

À titre d’illustration, le tableau n°57A des maladies professionnelles visant les affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail prévoit, pour la prise en charge de votre maladie professionnelle, plusieurs conditions à réunir :

  • La démonstration de l'existence d’une tendinopathie aiguë non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs
  • Le respect d’un délai de prise en charge de 30 jours entre la rédaction de la déclaration de maladie professionnelle et la fin de l’exposition au risque.
  • Une liste de travaux susceptibles de provoquer ces maladies, à savoir, les travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins 3h30 par jour en cumulé.

Si votre pathologie répond à l’ensemble de ces conditions, celle-ci sera reconnue imputable au service.

En deuxième lieu, un second régime prévoit le cas de figure où l’une des conditions des tableaux serait manquante. En effet, dans cette hypothèse, votre dossier sera examiné par une Commission de réforme qui aura pour mission de déterminer si votre pathologie est directement causée par l'exercice de vos fonctions.

En troisième lieu, si votre pathologie n’est pas prévue par les tableaux des maladies professionnelles, cela n’exclut pas pour autant toute reconnaissance de l’imputabilité de votre pathologie au service.

En effet, votre pathologie pourra être reconnue imputable au service si celle-ci est essentiellement et directement liée à l’exercice de vos fonctions et qu’elle entraine, à la date de votre demande, une incapacité permanente partielle prévisible d’au moins 25%. Votre pathologie peut donc, selon sa nature et les circonstances de sa survenance, dépendre de l’un de ces trois régimes.

Pourtant, de nombreuses administrations laissent encore à tort à la charge de leur agent le soin de démontrer en quoi leur maladie professionnelle est imputable au service sans faire application de l’article 21 bis.

L’instruction de la déclaration de maladie professionnelle par l’administration

  • D’établir un certificat médical initial indiquant la nature et la localisation des lésions résultant de la maladie professionnelle et la durée probable de l'incapacité de travail.
  • De compléter le formulaire (téléchargeable ici) de déclaration de maladie professionnelle précisant les circonstances de la maladie.

Pour effectuer une demande de reconnaissance d’une maladie professionnelle imputable au service, il est nécessaire :

Une fois le certificat médical établi, vous devez impérativement transmettre celui-ci à votre Administration. Il est préférable de toujours envoyer vos documents par courrier recommandé avec accusé de réception et de garder une copie du courrier ainsi transmis.

De même, vous devez impérativement transmettre votre déclaration de maladie professionnelle dans les 2 ans suivant la date de la 1re constatation médicale de la maladie. Au-delà de ce délai, vous ne pourrez plus effectuer de déclaration de maladie professionnelle concernant votre affection.

Votre administration doit se prononcer dans le délai de 2 mois à partir de la date à laquelle elle reçoit la déclaration de maladie professionnelle, le certificat médical et le résultat des examens médicaux complémentaires.

Ce délai peut être prorogé jusqu’à 3 mois dans le cas où l’administration souhaite procéder à des mesures d’instruction. Enfin, en l'absence de décision de l'administration à la fin du délai de 2 ou 5 mois, vous êtes placé provisoirement en congés pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS) pour la durée indiquée sur le certificat médical.

Dans le cas où l'administration refuse de reconnaitre l'imputabilité de votre accident au service de l'accident, vous devez rembourser les rémunérations et/ou frais médicaux indument perçus au titre du CITIS.

Vous disposez d’un délai de 2 mois pour contester cette décision.

La procédure de contestation de la décision de refus d’imputabilité d’une maladie au service d’un fonctionnaire :

Il existe de nombreux motifs permettant de contester le refus d’imputabilité de votre maladie professionnelle au service.

Il peut s’agir d’une erreur de droit sur la règlementation applicable à votre situation.

Par exemple, il est possible que l’administration refuse d'appliquer le principe de présomption d'imputabilité de votre maladie professionnelle au service.

Il peut également s’agir d’une erreur de droit du fait de l’irrégularité de l’avis de la Commission de réforme ou encore d’une erreur d’appréciation des faits.

Une requête sera rédigée par le cabinet afin de saisir le Tribunal Administratif compétent.

Un projet de requête vous sera soumis pour validation.

Une fois votre accord obtenu, la requête sera transmise au Tribunal.

Lorsque le dossier sera en état, une date d’audience sera fixée par le Tribunal.

Quarante-huit heures avant l’audience, le rapport du rapporteur public nous sera transmis.

Le rapporteur public ne fait pas partie de la formation de jugement, n’assiste pas au délibéré et ne participe pas à la décision.

Après avoir exposé les faits du litige et l’ensemble des arguments échangés entre les parties, le rapporteur propose en toute indépendance la solution de droit qui lui parait la plus appropriée.

La formation de jugement n’est pas obligée de suivre son avis, cependant dans la quasi-totalité des cas, le magistrat reprend la position du rapporteur.

Compte tenu du caractère écrit de la procédure —hors procédures d’urgence —, les parties ne sont autorisées à présenter que de brèves observations sans développer de nouveaux arguments.

À l’issue de l’audience, l’affaire est mise en délibéré.

La décision est notifiée quelque temps après l’audience.

Une fois que votre accident de service ou votre maladie professionnelle aura fait l'objet d'une prise en charge par votre administration, il vous sera possible de solliciter une indemnisation complémentaire de vos préjudices.

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